Selon un « scoop « du quotidien britannique The
Observer (article de Jason Burke du 28/09/08 site www.guardian.co.uk)
les Saoudiens sponsorisent des discussions de paix dans lesquelles est
impliqué l’un des ex hauts dirigeants Taliban d’un groupe réputé pour
sa ligne dure.
Négociations Secrètes de Paix Avec Les
Talibans – Pourquoi l’Occident Pense Qu’Il Est Temps De Discuter Avec Eux
Les Talibans se sont engagés dans des discussions secrètes portant sur
la fin du conflit en Afghanistan dans le cadre d’un « processus de paix
» de large envergure, sponsorisé par l’Arabie Saoudite et soutenu par
la Grande Bretagne, selon ce que révèle The Observer.
Des sources en Afghanistan ont confirmé au journal qu’il y avait eu
effectivement des discussions de ce type et, fait sans précédent, un
ancien membre de haut niveau du mouvement islamiste prônant une ligne
dure face à l’occupation de l’Afghanistan servirait de médiateur entre
les différentes parties impliquées voyageant entre Kaboul, les bases de
la direction des Talibans au Pakistan, l’Arabie Saoudite, et certaines
capitales européennes. La Grande Bretagne a fourni le soutien
logistique et diplomatique pour ces discussions, malgré les
déclarations officielles qu’il ne saurait y avoir de négociation tant
que les Talibans n’avaient pas renoncé à la violence.
également affirmé que ces dernières semaines ces efforts auraient été
suspendus à cause de la violence des combats et, selon des responsables
proches du gouvernement de Karzai à Kaboul, l’ »inconsistance » des
demandes des Talibans. L’un des objectifs de ces pourparlers c’est de
séparer les Talibans des djihadistes d’Al Qaeda, si tant est qu’il
existe effectivement des liens étroits entre eux.
La semaine dernière, le premier ministre français François Fillon a
fait allusion indirectement à ces discussions lors de son intervention
devant le parlement pour le vote sur le maintien des troupes françaises
en Afghanistan en disant : «
nous devons explorer des moyens de séparer les jihadistes
internationaux de ceux qui agissent plus pour des raisons nationales ou
tribales. Des efforts allant dans cette direction sont dirigées par des
pays musulmans sunnites telle que l’Arabie Saoudite ».
Cet été a été le plus violent depuis l’invasion menée par les
Américains de l’Afghanistan fin 2001 et également la plus meurtrière à
la fois pour les troupes US/OTAN et les populations civiles afghanes,
alors que la résistance des Talibans a gagné en expertise, menée sur le
mode de guérilla contre des forces d’occupation, impliquant des
populations qui jusque là s’étaient cantonnées à de la résistance
passive.
Bien qu’il y ait eu avant des contacts
avec des commandants Talibans à titre individuel et au niveau des
districts, l’initiative saoudienne est la première tentative pour
discuter avec le conseil de la direction des Talibans se trouvant dans
ou sur le pourtour de la ville de Quetta, au Sud Ouest du Pakistan,
connue sous l e nom de « Quetta Shura ». Mais pour le moment cette
démarche n’a pas encore intégré le Mollah Omar.
Ces discussions ont commencé cet été
et ont été engagées à la demande du gouvernement afghan actuel. Le
médiateur a passé plusieurs semaines à transmettre des listes de
demandes et contre listes de demandes entre la capitale afghane, Riyadh
et Quetta. Il s’est également rendu à Londres pour s’entretenir ave des
responsables du Ministère des Affaires Etrangères et des services
secrets M16. Une délégation des services secrets saoudiens s’est
également rendue à Kaboul.
Il y avait déjà eu auparavant un
échange entre Karzai et le dirigeant Taliban, un allié de Karzai,
Gulbuddin Hekmatyar, sans résultat. D’autre part, en fin d’année
dernière Karzai avait dit qu’il considérait comme bienvenu
l’opportunité de pouvoir parler directement avec Hekmatyar ainsi que le
Mullah Omar, affirmant qu’il était près à céder des postes clés au sein
de son gouvernement, ce qui correspondait à l’une des demandes
principales des Talibans. En effet, les Talibans ont dressé une liste
de 11 conditions pour mettre fin aux hostilités, dont un retrait
programmé des troupes étrangères d’Afghanistan ainsi que la possibilité
d’obtenir des ministères clés.
Il semblerait que les Talibans aient
assoupli leurs exigences. Auparavant, les portes parole des Talibans
avaient dit que seul le départ des troupes étrangères, l’instauration
de lois strictes s’appuyant sur la Sharia et un partage des
responsabilités gouvernementales seraient acceptables.
A Londres, le ministère des affaires
étrangères n’a pas confirmé ces révélations concernant ce que l’on
nomme dans les milieux diplomatiques l’ »initiative saoudienne », se
bornant à dire que le gouvernement britannique soutenait tout «
processus de réconciliation « engagé par le gouvernement Karzai , le
considérant comme faisant partie de la campagne de contre insurrection
engagée sur place.
Si l’initiative saoudienne rencontre,
semble-t-il, un écho favorable dans certaines capitales européennes, la
décision prises en juillet par Bush d’autoriser les troupes américaines
à lancer des opérations transfrontalières au Pakistan va à l’encontre
de ces efforts de négociation, voire même pourrait avoir pour but de
les faire échouer. En effet, les attaques transfrontalières récemment
menées par les soldats US visent justement les Talibans (Pashtouns) au
Pakistan. D’autre part, Karzai sous l’influence de Washington, a
récemment fermement pris position pour ces opérations
transfrontalières, sachant bien sûr qu’elles allaient saper tout
processus de réconciliation nationale – les Pashtouns qui se trouvent
de part et d’autre de la frontière ont averti qu’ils prendraient tous
les armes pour aller combattre les US/OTAN en Afghanistan si ces
opérations ne cessaient pas – et qu’elles ne feraient qu’accroître les
affrontements et la détermination de la résistance afghane isolant
encore un peu plus Karzai.
A Kaboul, c’est son conseiller à la
sécurité nationale, Zalmay Rasul, qui est en charge des négociations.
Selon le journal, The Observer,
pour le moment Karzai n’a pas encore formulé de réponse aux demandes
faites par les Talibans engendrant ainsi une certaine frustration chez
les responsables et diplomates occidentaux.
Pour l’instant les Etats Unis
s’orientent plutôt vers une intensification de la présence militaire et
des opérations en Afghanistan, faisant pression sur leurs alliés pour
qu’ils accroissent le nombre de troupes déployées notamment dans les
zones de combat au Sud et à l’Est.
Pourquoi l’Occident pense qu’il est temps de discuter avec les Talibans et sollicite l’appui des Saoudiens
Le soutien apporté par certains pays occidentaux à ces allées et venues
de ce Taliban barbu, habillé du costume traditionnel qui voyage
incognito, est en soi révélateur de la situation catastrophique en
Afghanistan, un état de fait reconnu en privé par les gouvernements de
ces pays alors même que publiquement et avec des nuances ils le nient.
Cela prouve que ces gouvernements sont prêts à rechercher par tous les
moyens la stabilisation du pays car l’aggravation de la situation
coûtent en vies humaines, en argent et politiquement puisque les
opinions publiques sont contre cette guerre d’occupation.
En France 62% des français sont contre
la présence des troupes françaises en Afghanistan, mais Sarkozy
toujours à «l’écoute», et soutenu par ses lèches basquettes d’UMP/NC au
Parlement, vient de décider d’envoyer des renforts en matériel et en
hommes.
Que l’Arabie Saoudite ait pris
l’initiative d’une telle démarche montre également à quel point ceux
qui gouvernent cette nation traditionnellement à la tête du monde
musulman sunnite s’inquiètent des répercussions que ce conflit peut
avoir sur le reste du monde islamique. C’est également une façon pour
la Maison des Saud, écartée des négociations pour régler la crise
libanaise au profit du Qatar, de montrer qu’il faut toujours compter
avec elle dans le champ de la politique régionale. Ce n’est pas la
première fois que l’Arabie Saoudite intervient en Afghanistan. Les
Saoudiens, avec le Pakistan et les Emirats Arabes Unis ont été les
seuls états à reconnaître le régime des Talibans dans les années 90. En
1998, l’Arabie Saoudite avait pratiquement conclu un accord avec le
Mollah Omar pour qu’il livre Osama Ben Laden.
Pour les pays occidentaux, la
participation saoudienne est primordiale car les efforts qu’ils ont
entrepris directement pour négocier avec les Talibans se sont soldés
par un échec. Le processus de réconciliation engagé par Karzai a eu un
impact très limité, seuls quelques 5000 combattants et une poignée de
commandants tous en bas de l’échelle hiérarchique dans le monde Taliban
se sont ralliés à ce processus. Mais si les pays occidentaux qui
acceptent ce processus de négociations ont en arrière pensée la
stratégie de contre insurrection du « diviser pour mieux régner » en
Afghanistan, ils risquent d’en subir les conséquences.
Les Talibans malgré la rhétorique du « combat jusqu’au départ du dernier croisé » ont publié récemment sur leur site internet une déclaration disant que «
les portes sont ouvertes pour des discussions, des échanges et les
négociations sont toujours bienvenues aves des mujahideens tels que
Rabbani (L’ex président afghan, Burmahuddin Rebbani) qui ont combattu
les Russes dans les années 80. »
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