Un rabbin colon publie le guide complet pour
tuer des non-Juifs
Didi Remez
[L’enseignement du roi], qui vient d’être publié, a été écrit par le
rabbin Yitzhak Shapira, doyen de la yeshiva Od Yosef Hai dans la
communauté de Yitzhar, avec un autre rabbin de la yeshiva, Yossi
Elitzur.
l’extrême-droite juive, fondamentaliste et raciste, il n’y a pas d’âge
pour apprendre à massacrer son prochain, pour peu que l’on bénéficie
d’une dérogation divine.
Le livre ne contient pas moins de 230 pages sur les
lois concernant le meurtre de non-Juifs, une sorte de guide pour
quiconque se pose la question de savoir si et quand il est permissible
de prendre la vie d’un non-Juif.
Quoique le livre ne soit pas vendu par les grands
distributeurs, il a reçu de chaudes recommandations par des éléments de
la droite, y compris les recommandations de rabbins importants tels que
Yitzhak Ginsburg, Dov Lior et Yaakov Yosef, qui sont imprimées au début
du livre. Le livre est distribué via Internet et par la yeshiva, et
actuellement le prix de lancement est de 30 shekels l’exemplaire. À la
cérémonie commémorative qui s’est tenue ce week-end à Jérusalem pour le
rabbin Meir Kahane, tué il y a 18 ans, des copies du livre furent
vendues.
Au long du livre, les auteurs traitent en profondeur
des questions théoriques de la loi religieuse juive concernant le
meurtre de non-Juifs. Les mots « Arabes » et « Palestiniens » ne sont
pas mentionnés même indirectement, et les auteurs prennent soin
d’éviter de faire des déclarations explicites pour qu’un individu
applique la loi de ses propres mains.
Le livre contient des centaines
de sources de la Bible et de la loi religieuse. Il inclut des citations
d’Abraham Isaac Kook, un des pères du Sionisme Religieux, et du rabbin
Shaul Yisraeli, un des doyens de la yeshiva Mercaz Harav, la citadelle
du Sionisme national-religieux située à Jérusalem.
Le livre débute par une interdiction du meurtre de
non-Juifs et la justifie, entre autres choses, au motif de prévenir
l’hostilité et toute désacralisation du nom de Dieu. Mais très
rapidement, les auteurs passent de l’interdiction à la permission, aux
diverses dérogations pour faire mal à des non-Juifs, la raison centrale
étant l’obligation de faire respecter les sept lois Noahides, que
chaque être humain sur terre doit suivre. Parmi ces commandements se
trouvent les interdictions du vol, de l’effusion de sang et de
l’idolâtrie. [Les sept lois Noahides interdisent l’idolâtrie, le
meurtre, vol, les relations sexuelles illicites, le blasphème et la
consommation de la chair d’un animal vivant, et exige des sociétés
l’institution de lois justes et de cours judiciaires].
« Quand nous approchons un non-Juif qui a violé les
sept lois Noahides et que nous le tuons par souci de faire respecter
ces sept lois, aucune interdiction n’a été violée », déclare le livre,
qui souligne que tuer est interdit sauf si c’est effectué par
obéissance à la décision d’une cour. Mais plus loin, les auteurs
limitent l’interdiction, notant qu’elle ne s’applique qu’à un « système
approprié concernant les non-Juifs qui violent les sept commandements
Noahides ».
Le livre inclut une autre conclusion qui explique qu’un
non-Juif peut être tué même s’il n’est pas un ennemi des Juifs. « Dans
toute situation où la présence d’un non-Juif met en danger des vies
juives, le non-Juif peut être tué même si c’est un Gentile vertueux pas
du tout responsable de la situation qui a été créée », disent les
auteurs. « Quand un non-Juif aide un meurtrier de Juifs et cause la
mort de quelqu’un, il peut être tué, et dans tous les cas quand la
présence d’un non-Juif pose un danger à des Juifs, le non-Juif peut
être tué ». Une des dérogations pour tuer des non-Juifs, d’après la loi
religieuse, s’applique dans un cas de din rodef [la loi du
« poursuivant » d’après laquelle celui qui suit un autre avec une
intention meurtrière peut être tué de manière extrajudiciaire] même si
le poursuivant est un civil. « La dispense s’applique même quand le
poursuivant ne menace pas de tuer directement, mais seulement
indirectement », indique le livre. « Même un civil qui vient en aide à
des combattants est considéré comme un poursuivant et peut être tué.
Quiconque assiste l’armée des malfaisants d’une quelconque manière
renforce les meurtriers et est considéré comme un poursuivant. Un civil
qui encourage la guerre donne au roi et à ses soldats la force pour
continuer. Par conséquent tout citoyen de l’État qui s’oppose à nous
qui encourage les soldats combattants ou exprime de leurs actions une
satisfaction est considéré comme un poursuivant et peut-être tué.
Pareillement, quiconque affaiblit notre propre État par la parole ou
par une action similaire est considéré comme un poursuivant ».
Les rabbins Shapira et Elitzur déterminent qu’on peut
aussi faire du mal à des enfants parce qu’ils sont des « entraves ».
Les rabbins écrivent ce qui suit : « Entraves – on trouve souvent les
bébés dans cette situation. Ils bloquent le chemin du secours par leur
présence et le font complètement de force. Néanmoins, ils peuvent être
tués parce que leur présence aide le meurtre. Il est justifié de tuer
des bébés s’il est clair qu’ils grandiront pour nous nuire, et dans une
telle situation on peut leur faire du mal délibérément, et pas
seulement pendant le combat avec des adultes ».
De plus, les enfants du meneur peuvent être touchés
pour faire pression sur lui. Si l’attaque des enfants d’un mauvais chef
va l’influencer pour qu’il ne se comportent pas méchamment, on peut
leur faire du mal. « Il vaut mieux tuer les poursuivants que tuer
d’autres », déclarent les auteurs.
Dans un chapitre intitulé « Mal délibéré à des
innocents », le livre explique que la guerre est dirigée principalement
contre les poursuivants, mais ceux qui appartiennent à la nation
ennemie sont aussi considérés comme ennemis parce qu’ils assistent des
meurtriers.
La rétorsion a aussi une place et une fonction dans ce
livre des rabbins Shapira et Elitzur. « Pour vaincre les ennemis, nous
devons nous comporter envers eux dans un esprit de représailles et de
mesures pour mesures », écrit-il. « Les représailles sont absolument
nécessaires pour que cette méchanceté ne vaille pas le coup. Par
conséquent, parfois nous faisons des actes cruels pour créer le bon
équilibre de la terreur ».
Dans une note de bas de page, les deux rabbins écrivent
d’une manière qui semble permettre à des individus d’agir par
eux-mêmes, hors de toute décision du gouvernement ou de l’armée : « Une
décision par la nation n’est pas nécessaire pour permettre de verser le
sang du royaume du mal », écrivent les rabbins. « Même des individus de
la nation attaquée peuvent les frapper ».
À la différence des livres de loi religieuse publiés
par les yeshivas, cette fois-ci les rabbins ont ajouté un chapitre
contenant les conclusions du livre. Chacun des six chapitres est résumé
en points principaux de plusieurs lignes, qui exposent, entre autres
choses : « Dans la loi religieuse, nous avons trouvé que les non-Juifs
sont généralement suspects de verser le sang juif, et dans la guerre,
cette suspicion devient bien plus grande. On doit considérer de tuer
même des bébés, qui n’ont pas violé les sept lois Noahides, à cause du
danger futur qui sera causé s’ils sont autorisés à devenir aussi
mauvais que leurs parents ».
Même si les auteurs prennent soin, comme indiqué,
d’utiliser le terme « non-Juif », il s’en trouvera certainement pour
interpréter la nationalité des « non-Juifs » responsables de mettre en
danger le peuple juif. Ceci est renforcé par la brochure « La voix
juive » publiée sur Internet depuis Yitzhar, qui commente le livre :
« Il est superflu de faire remarquer que nulle part dans le livre il
n’est écrit que les déclarations ne concernent que les non-Juifs
d’autrefois ». Les éditeurs de la brochure n’ont pas oublié une
remarque cuisante en direction des services de sécurité (GSS), qui se
donneront certainement la peine de se procurer une copie. « Les
éditeurs suggèrent au GSS qu’ils attribuent le prix de la sécurité
d’Israël aux auteurs », déclare la brochure, « qui ont donné aux
enquêteurs le choix de lire les conclusions résumées sans avoir besoin
d’une étude du livre entier en profondeur ».
Un étudiant de la yeshiva Od Yosef Hai à Yitzhar a
expliqué d’où, de son point de vue, les rabbins Shapira et Elitzur ont
tiré le courage de parler si librement sur un sujet tel que le meurtre
de non-Juifs. « Les rabbins n’ont pas peur de poursuites parce que dans
ce cas, Maimonides [le rabbin Moses ben Maimon, 1135-1204] et
Nahmanides [rabbin Moses ben Nahman, 1194-1270] devraient être aussi
traînés en justice, et de toute façon, ceci est une recherche sur la
loi religieuse », a dit l’étudiant de la yeshiva. « Dans l’État juif,
personne n’est ainsi en prison pour avoir étudié la Torah ».
* Note du traducteur :
Ces interprétations religieuses ont été traitées de manière détaillée
dans : Israel Shahak et Norton Mezvinsky, « Jewish Fundamentalism in
Israel », Pluto Press (1999).
http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=7611